Desherbage électrique : Il y a de l’electricité dans la terre !
« L’alternative la plus adaptée à notre vignoble »
Les outils XPower sont des équipements de désherbage à haute tension, non chimique et non sélectif entre ou sur les rangs de culture. Ces solutions sont développées par Zasso via la plateforme AGXTEND et distribuées en Europe par le réseau de Case New Holland. La gamme XPower XPS est l’outil dédié au désherbage des vignes et des vergers. La gamme XPower est déjà commercialisée à plus de 80 exemplaires en Europe. Aujourd’hui, nous partons à la rencontre de François Hersard, jeune viticulteur Français, qui a investit il y a 2 ans dans cette solution de désherbage électrique pour remplacer l’utilisation du glyphosate.
Le viticulteur et son vignoble
Nom : François Hersard
Âge : 35 ans
Expérience : BTS Oeno/viticulture + 19 ans d’expérience en viticulture, dont 9 en tant que responsable du vignoble familiale.
Localisation : France / Val de Loire / Saint-Nicolas-de-Bourgueil
Domaine : 19 ha + ETA, en 1,90 mètre
Certification : HVE3 depuis 2018
Tracteurs : New Holland / Renault
Bons et mauvais points
+ Constructeur à l’écoute
+ Peu de modification du vignoble
+ Processus de sécurité
+ Qualité d’un désherbage naturel
- Risques de liés à la haute tension
- Pannes de composants et délai d’approvisionnement
- Console et machine volumineux
- Besoin d’un tractoriste qualifié
Données techniques Machine
Robot : XPower XPS par AGXTEND 2021
Heures de fonctionnement : 250h
Poids : Outil porté de 1 200 kg
Energie : Prise de force / 480 - 490 rpm / 100 cv
Caractéristique remarquable : Nouveau système de palpeur / Un pôle positif en moins
Prix brut : €113 000HT avec un an de garantie
COmment avez-vous découvert le désherbage electrique ? Pourquoi avoir investi dans cette technologie ?
Le déclic a eu lieu lors de la crise du COVID, en hiver 2020. En constatant que les vins biologiques se valorisaient mieux durant cette période, on a remis en question nos méthodes de travail. On s’est demandé qu’est ce qu’on devait changer pour passer en en culture biologique dans les prochaines années. On réalisait en moyenne 2/3 désherbage chimique et 4/5 passages de fongicides par an, et on voulait leur trouver des alternatives avant de se convertir.
J’ai passé l’hiver à étudier les différentes alternatives aux désherbages chimiques. Lors de mes recherches, je suis tombé sur des vidéos de cette machine qui désherbait des vignes à l’aide de l’électricité. Après avoir approfondi le sujet, j’ai contacté mon concessionnaire New Holland pour lui en parler et organiser une démonstration sur notre domaine.
Après un délai de 5 mois, on a pu organisé cette démonstration. En d’Avril 2021, les équipes d’AGXTEND et de Zasso sont venues nous montrer la machine sur une vingtaines d’ares. Le résultat du désherbage a mis quelques jours à se faire ressentir, mais deux semaines le résultat nous a convaincu que cette solution correspondait à notre vignoble.
Comment fonctionne cette machine ?
La machine s’atèle sur le tracteur comme une outil classique, on a besoin du trois points et d’une prise de force arrière. Une génératrice est placée à l’arrière de l’outil et transforme cette énergie mécanique en une énergie électrique de basse tension. Cette électricité est ensuite passée en haute tension grâce à des transformateurs. En sortie c’est 6000 à 8000 Volts qui sont appliqués sur chaque éléments à l’aide deux pôles, un négatif et un positif. L’électricité sort par le pôle positif, circule à travers la tige, éclate les cellules et les vaisseaux de la plante jusqu’aux racines, puis revient dans le pôle négatif.
Pour régler la machine, il y a une console en cabine qui nous permet d’ajuster le désherbage en fonction des conditions de travail.
Comment gères-tu l’aspect sécuritaire ?
L’aspect sécurité est très important, on a une formation d’une journée obligatoire avec le concessionnaire durant laquelle on est formé sur les réglages de la machine et son fonctionnement, mais surtout sur les risques et la sécurité à mettre en place.
Ce n’est pas une machine qu’on met entre les mains de n’importe qui. A chaque utilisation, il y a tout un processus de sécurité à respecter. D’abord, je m’équipe toujours de bottes et de gants spéciaux pour m’isoler au maximum. Avant de lancer la machine, j’installe des panneaux de signalisation aux 4 coins de la parcelle pour m’assurer que personne n’y rentre. Ensuite je rentre mes identifiants sur l’écran, je démarre une tache, je règle la prise de force. La tâche doit être bien réglée avant de pouvoir mettre les transformateurs à haut régime. Si le processus est bien respecté et les conditions sont bonnes, un voyant clignote, c’est le signal que la machine peut envoyer l’électricité dans les éléments.
Comment s'est passé le lancement avec la machine ? la machine a-t-elle évolué depuis que tu as commencé à travailler avec elle ?
La mise en route s’est globalement bien passée, après la formation je connaissais la machine et j’étais en confiance avec.
Dans les premières semaines, on a eu quelques soucis de mise à jour obsolètes et d’autres petites pannes qui ont rapidement été corrigées sur place par le technicien.
On a reçu la machine en fin d’été 2021, du coup on a un peu attendu avant de s’en servir, car oui il y a des conditions d’utilisations à respecter. Si c’est trop sec, il faut éviter d’utiliser la machine car il y a un réel risque de départ de feu. J’ai eu le cas deux trois fois avec un départ de feu sur l’élément négatif à cause d’une accumulation de végétaux et surchauffe dans cette zone. Rien de grave, j’ai rapidement coupé la puissance de la machine et j’ai éteint le foyer.
En Août 2022, les éléments gauches et droits ont justement été changés pour éviter cette accumulation de végétaux, ils ont été renforcés et les câbles ont été mieux intégrés. Depuis, je n’ai pas eu de problème sur le dernier passage.
Des ventilateurs extracteurs d’air ont été rajoutés sur la machine pour pallier à la surchauffe des transformateurs. Cette surchauffe entrainait une coupure de puissance déclenché par la machine qui se mettait en sécurité.
Comment le service et la maintenance sont-ils organisés ?
C’est un point sur lequel la machine et le constructeur peuvent s’améliorer. Il faut souvent attendre un délai de 5 jour lorsqu’il y a un composant à changer avec l’intervention d’un technicien.
Quand je tombe en panne, je commence par appeler le mécano de mon concessionnaire. Je lui envoie des photos/vidéos avec lesquelles il crée un dossier en ajoutant un descriptif de la panne. Grâce à un modem placé sur la machine, le constructeur a accès en direct aux données de la machine, il arrive généralement à identifier le problème rapidement. En revanche les pièces viennent d’Allemagne et les techniciens du constructeur ne sont pas sur place, ce qui explique le délai d’intervention.
Pour le moment, tout le service, c’est à dire la maintenance, les réparations, les abonnements aux communications et les améliorations sont compris dans le prix initial avec ses un an de garantie, je n’ai rien à débourser. Les mises à jour sont installées sur place par le concessionnaire via la console, car pour le moment le constructeur ne peut pas prendre le contrôle à distance de la machine.
Quelles sont les contraintes liées à l'utilisation de la machine ? As-tu changé ta façon de désherber ?
La plus grosse contrainte d’utilisation, c’est l’humidité. Si c’est trop sec, les arcs électriques risquent de mettre le feu. Et si c’est trop humide, l’électricité se dissipe trop et la machine le détecte et se met en sécurité automatiquement.
Le stade de développement des mauvaises herbes est aussi à prendre en compte. Plus on attend et plus on perd en efficacité de désherbage. Il faut donc passer le plus rapidement possible et éviter lorsque les herbes font plus de 20 cm.
Pour la géométrie du vignoble, la machine marche très bien face à la pente, moins en dévers. Sur cette version, il faut compter entre 1m80 minimum d’espacement car la machine est assez volumineuse.
Oui bien évidement, je me suis adapté aux conditions d’utilisation de la machine. On n’avait jamais travaillé le sol, du coup nos jeunes plans n’étaient pas protégés par des tuteurs. On a ajouté 14 000 tuteurs, mais un désherbage mécanique nous aurait dans tous les cas contraint au même changement.
Par rapport aux herbicides, notre fenêtre de désherbage a diminué. On a décidé de dédier un tracteur à son utilisation pour être plus réactif et éviter de perdre 1 heure à atteler la machine et sa console.
Comment l’utilises-tu ? Combien de passage ? quelles surfaces ?
Sur nos 15 hectares en 1,90m, on fait 4 passages par an. Un premier passage en Avril pour éliminer les adventices qui sont sorties de terre durant l’hiver. Deux autres passages pour maintenir le cavaillon propre, un avant l’été et un après, pour éviter la saison sèche. Et on finit avec un passage juste avant que les feuilles ne tombent par terre en Octobre, pour éviter que le sol ne soit trop humide.
En plus de nos parcelles, cette année j’ai fais 15 hectares supplémentaires en prestation de service pour d’autres viticulteurs des alentours, avec 4 passages la aussi.
Grâce à ces passages, je n’ai plus besoin d'épamprer mes vignes. Les pampres situés à moins de 30cm du sol rentrent en contact direct avec les électrodes et grillent sans affecter le pied de vigne.
Je peux faire 6 hectares par jour sur une journée de 12 heures environ. Je suis autour de 0,5 hectares à l’heure en moyenne. Je règle ma vitesse sur la densité d’adventices. S’il y en a beaucoup, je roule à 2,5 km/h, si c’est assez préservé, je monte à 3 km/h. Je pourrais aller plus vite, mais des études ont montré qu’on perdait rapidement en efficacité.
Le tracteur consomme 8/9L par heure à 1400 tour / minutes.
quelle est la différence entre le desherbage electrique et le désherbage chimique ?
Pour la préparation, les deux solutions exigent un cavaillon plat, il ne faut surtout pas chausser les vignes. Les électrodes interviennent sur une largeur moins importante que celle sur laquelle on appliquait le désherbant.
En terme d’efficacité le résultat est quasiment similaire. Ce qui change, c’est le temps que la plante va mettre à mourir. Avec le désherbage éléctrique, la plante jaunit au bout de quelques jours alors qu’avec le désherbage chimique, elle meurt naturellement sous 1 à 2 semaines.
Je pense que le désherbage électrique est plus limité à long terme, notamment sur les graines présentent dans le sol. Lorsqu’on désherbe chimiquement, on associe souvent un anti germinatif au mélange, c’est ce qui nous permet d’intervenir que 2 fois par an. Avec cette machine, on a moins d’impact sur les germes, c’est pourquoi on est obligé de passer plus souvent.
Et pour finir la différence c’est le coût. Pour un désherbage chimique on doit être autour des 150-200 € de l’hectare. Pour vous donner un ordre d’idée, en prestation de service, je facture 80€ de l’hectare par passage.
Comment vois-tu évoluer ta machine dans les années à venir ?
Vu que je fais de la prestation de service, j’aimerais bien gagner en productivité et en longévité du matériel. C’est à dire avoir un produit plus mature et une meilleure qualité de désherbage afin de travailler plus efficacement. Idéalement, en considérant 3 passages, il faudrait que je puisse faire 80 hectares de prestations par an pour rentabiliser la machine. Mais le produit est encore jeune, il évolue très rapidement donc ça va venir progressivement.
J’aimerais que la machine et son écran soient plus compactes. Dans un tracteur viticole ou dans les vignes on manque toujours de place. La machine n’est pas encore isobus et l’écran est très volumineux. Ensuite le volume de la machine réduit considérablement le champ de vision arrière, ce qui fait qu’on a peu de visibilité sur le travail et sur l’environnement arrière.
Et pour finir, il faut améliorer le suivit d’entretien. Pour le nettoyage, les accès maintenance et réparations, c’est encore flou pour le moment. Or si on veut que la machine perdure, il faut l’entretenir. Mais le constructeur est à l’écoute et je sais que ces points sont déjà pris en compte.
Quels conseils donnerais-tu à d'autres agriculteurs qui s’interrogent sur le désherbage electrique ?
C’est une machine dont il faut prendre soin et avec laquelle il faut être très attentif à la sécurité. C’est indispensable d’avoir un chauffeur expérimenté et très attentionné dans les équipes.
S’assurer de l’efficacité du désherbage électrique dans vos conditions propres est important, pour cela, mieux vaut la tester sur votre type de sol en amont de l’achat.
Si les résultats sont convaincants, que vous avez les moyens et les équipes pour s’occuper de la machine, il faut se lancer !
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